Faty, Faty

DAKAR, 8 décembre 2020 – En février 2019, profitant de l’occasion de la Saint-Valentin, je m’épanchais ici sans honte pour dire combien j’aime ma grande soeur, Faty (*), souhaitant avoir une fille pour lui donner son prénom, sachant bien que, en raison de l’horloge biologique, d’un sinueux parcours de santé, de quelques vives désillusions ainsi que de facteurs plus ou moins à ceux-là liés, cela tenait un peu beaucoup du voeu pieux

Parce que, je vous le dis, j’avais abandonné l’idée de pouvoir enfanter et m’étais résignée à vieillir en « femme sans », selon l’expression de Madeleine Chapsal.

(Photo : Coumba Sylla)

« Je suis une femme sans – c’est à dire une femme sans enfant.

Longtemps je n’en ai pas souffert, du moins du fait des autres : après tout, jusqu’à un certain âge on peut encore se reproduire. Mais, quand la réalité de ma stérilité a été avérée, a commencé la lente, insidieuse, inflexible répudiation. (…)

Ce livre est le récit de mon histoire et de celle de bien d’autres qui, souvent, souffrent comme moi. »

Madeleine Chapsal, « La Femme sans », Editions Fayard, 2001.

Je n’en avais développé, je crois, aucune aigreur ou amertume. Parce que je sais que cela arrive, point.

Et j’ai suffisamment entendu, depuis que je suis en âge de comprendre, que « den tɛ san » (« l’enfant ne s’achète pas ») – enfin, dans un monde sans ces trafiquants qui en font commerce. Je l’ai entendu à foison également dans les conseils d’ascendants, dans des chansons, dont de belles versions existent, grâce notamment à Kassé Mady Diabaté…

… et Ami Koïta, qui a chanté la même chose, « Den tɛ sanna ».

Mais, comme on dit chez moi, « duwaw bɛ te minɛ u kɛ don », « tous les souhaits ne sont pas exaucés aussitôt formulés ».

Devinez quoi ?

Un jour, c’est arrivé.

Ou plutôt, ça m’est tombé dessus.

En février 2020, j’ai accouché d’une petite fille baptisée Faty Tchiyel.

Son premier vrai prénom, c’est Fatoumata, comme ma grande soeur, dont Faty est le doux dimunitif. Tchiyel est un mot seereer (sérère) – l’ethnie de son père – signifiant « cadeau », « bénédiction », « don de Dieu ». En bambara, on dirait « Ala sɔn (ou Allah sɔn) ».

(Photo : Coumba Sylla)

« Dreams do come true », les rêves se réalisent… c’est même écrit sur le matelas à langer de Faty Tchiyel.

(Photo : Coumba Sylla)

Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de ma soeur Faty. Et cela m’a paru un beau jour et une belle occasion pour lui souhaiter de jolies, grandes et belles choses, dans la pleine santé et une longue vie – ou plutôt lui reformuler ce qui est chaque jour dans mon coeur. Des bonheurs comme elle en a procurés à moi, à d’autres. Entre autres voeux pour elle.

A droite, Faty ; à gauche, moi. Image publiée avec l’autorisation de Faty. (Photo : archives familiales.)

Aujourd’hui, c’est un beau jour pour dire que j’espère que la petite Faty grandira en ayant conscience de la personne inspirante qu’est sa tɔgɔman, son homonyme. Peut-être l’a-t-elle déjà senti, d’ailleurs, parce que quand elle entend la voix de ma grande soeur, elle a une sorte d’inimitable perle et demie de rire… Et elle y ajoute une autre perle quand on l’appelle « Faty Faty, Faty Tchiyel » – comme le font ma mère et mes soeurs.

Aujourd’hui, c’est un beau jour pour dire publiquement merci à Dieu pour ce petit être qu’Il a envoyé dans ma vie, de la plus inattendue des manières. Merci, mon Dieu, pour celui que Tu as choisi pour que cela soit. Merci, mon Dieu, pour ce nouveau chemin vers lequel Tu as aiguillé mes pas.

(Photo : Coumba Sylla)

Aujourd’hui, c’est aussi l’anniversaire de Hady Ba qui, sans réfléchir, m’a adoptée comme soeur il y a trois ans. (En l’apprenant, je suis sûre que ma mère a dû penser : « Ooooh, il ne sait pas ce qu’il a fait… » Ne prenez pas la peine de me demander pourquoi, je ne prendrai pas la peine de vous le dire. ) J’appelle Hady « le jumeau décalé de Faty ».

Faty, Hady. La jolie consonance des prénoms des aînés…

Ce jour d’anniversaire est, enfin, une belle occasion pour renouer avec mes errances. Une occasion de remettre un peu de vie dans cet espace et d’essayer de me relever de cette année 2020 qui a emporté des piliers de mes familles. En juillet, Pa’ Kader Diop [papa Kader Diop] a rejoint Yaye Fatou [maman Fatou] Camara Diop, partie en janvier au ciel (comme j’ai appris à le dire avec une autre soeur, la super, l’immense Kiné Fatim Diop – une autre homonyme de ma fille, car Fatim, Fatime, Fatima, Faty, Fati, Fatou, Fatoumata, Fatma, c’est le même prénom dit/écrit différemment). En septembre, tonton Alou (Aliou) Sall (il aimait qu’on dise « Alou Badra Sadia Sall ») a suivi tonton Abdoulaye Sall, qui nous a quittés en mai. Pour ne citer qu’eux quatre, en attendant de vous parler d’eux une autre fois, quand le courage m’en viendra…

A la prochaine.

Coumba Sylla

(*) Pour rassurer mon père, qui s’inquiète que les autres membres de la fratrie prennent ombrage de ma déclaration d’amour à Faty : toutes les sœurs, celles du sang et celles du coeur, le savent, que je les aime. J’aime aussi mes frères. Mais bon, pas sûr que eux en aient conscience. Il faudrait que je pense à le leur dire (plus souvent)…

3 commentaires sur “Faty, Faty

  1. Une belle déclaration. 🥰😇
    Une écriture toujours épurée 👌.
    Tu n’as pas perdu la main avec la new Faty 😁😁je dirai même qu elle booste ton inspiration mashallah🙏.
    Joyeux anniversaire à la merveilleuse sista, tu assumes grave ton rôle 😘😘😘 allah ki mè chimayala amen .
    Bisous à ma petite Coumba….

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  2. Je suis sans voix, vive l’amour, longue vie à notre grande sœur adorée.
    Énorme bisou 😘

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