- « Faits divers – 1 210 nouvelles en trois lignes » de Félix Fénéon (domaine public).
Une version numérique de ce livre est disponible aux Editions Publie.net (collection Classiques, réédition 2014).
Extrait téléchargeable sur le site de cet éditeur (format ePUB ou MOBI).


Ces « Nouvelles en trois lignes » de Fénéon ont été « chronologiquement publiées par le journal Le Matin en 1905 et 1906″, indique Publie.net, « Fénéon ne quitte pas la littérature : un virtuose de la grammaire. Pas plus d’un adjectif ou d’un adverbe – mais lâché comme une balle, libre ».
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EXTRAITS
Enquête intra nette
« L’affaire des détournements à la direction de l’artillerie de Toulon se réduirait à rien, d’après l’enquête du directeur. »

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Emportées
« Une façon de marabout qu’hébergeait un Arabe des environs de Constantine lui a emporté sa cassette et sa fille. »

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Tramway infernal
« Le feu a pris, hier soir, dans un tramway Bastille-Montparnasse qui, vite, dégorgea son monde et que les pompiers inondèrent. »

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Par les fenêtres
« L’église de Miélin (Haute-Saône) étant barricadée, les fidèles y entrent par les fenêtres pour les offices. »

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Boisson pétrole
« Louis Lamarre n’avait ni travail, ni logis, mais quelques sous. Il acheta, chez un épicier de Saint-Denis, un litre de pétrole et le but. »

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Funeste geste
« Dormir en wagon fut mortel à M. Emile Moutin, de Marseille. Il était appuyé contre la portière ; elle s’ouvrit, il tomba. »

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Anti-cumul
« Les groupes socialistes stéphanois se prononcent contre le cumul. C’est dire à M. Ledin, député, de ne pas rester maire. »

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A toutes fins utiles…
- « Nouvelles en trois lignes » par Christine Marcandier, Diacritik, 13 septembre 2015.
Où l’on lit que dans ces courts textes, « l’écrivain se donne un cadre extrêmement précis, voire rigide – trois lignes, voire moins – pour croquer un fait divers réel. Ce principe est celui de la « brève » en journalisme (…) : donner en peu de mots un maximum d’informations. C’est entre les lignes, dans un effet de chute, dans une pointe, que se dit l’essentiel. »
« C’est l’essence du journalisme (des faits, rien que des faits) comme sa mise à distance. On est en apparence dans la concision des dépêches, le sens second naît entre les mots, de la contrainte formelle dont Fénéon fait une arme littéraire. Le fait brut devient poème en prose. »
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- « Le très curieux Félix Fénéon ou trois lignes d’anarchie dans les belles-lettres » par Kairos, blog collectif (Edition) Plages de lectures, 23 janvier 2010.
Où l’on lit que Fénéon, alors anarchiste réputé, se retrouve devant la justice à la suite de la découverte, à son bureau du Ministère de la Guerre – il en était un « employé modèle » -, de détonateurs, qui furent saisis. Au procès, dialogue entre le président de la Cour et l’accusé (en premier, le président de la Cour).
– Vous avez dit que vous croyiez que ces détonateurs n’étaient pas des engins explosifs. Monsieur Girard a fait des expériences prouvant qu’ils étaient dangereux.
– Cela prouve que je me trompais.
– Il est établi que vous vous entouriez de Cohen et d’Orthiz.
– Pour entourer quelqu’un, il faut au moins trois personnes.
– On vous a vu causer avec des anarchistes derrière un réverbère.
– Pouvez-vous me dire, M. le Président, où ça se trouve, derrière un réverbère ?
– Interrogée pendant l’instruction, votre mère a déclaré que votre père les avait trouvés dans la rue.
– Cela se peut bien.
– Cela ne se peut pas. On ne trouve pas des détonateurs dans la rue.
– Le juge d’instruction m’a demandé comment il se faisait qu’au lieu de les emporter au Ministère, je n’eusse pas jeté ces tubes par la fenêtre. Cela démontre qu’on pouvait les trouver dans la rue.
Coumba Sylla