DAKAR – La semaine dernière, j’ai encore croisé sur mon chemin un menu de restaurant intrigant…
« Riz au poisson rouge emecé viande. »

Sans ponctuation, difficile de savoir si viande et poisson se retrouveront dans la même assiette après avoir été forcés à cohabiter dans la marmite de cuisson. A l’intuition, je décide qu’il s’agit de deux plats : un au poisson, et un à la viande. (J’avais déjà décidé que le plat du jour n’était pas le « Petit déj » souligné…)
Mais « emecé viande » ? Qu’est-ce donc que cela ?
Idée numéro 1 : de la viande d’un animal qui, vivant, a bu de l’alcool à la place de l’eau. A en être ivre du matin au soir et du soir au matin. D’où l’on pourrait déduire qu’il s’agit de viande éméchée. Enfin, « éméchée viande »…
Je sens un « Safurulaye ! » (comme on dit « Astaghfirullah ! » en Bambaraphonie) qui s’apprête à quitter quelque cerveau pour quelque bouche, mais, eh, pas si vite. Vous n’avez pas entendu cette légende de bière ou saké qu’on donnerait à une certaine race de boeuf pour en rendre la viande très tendre ? Vous n’avez pas entendu toutes ces choses autour du boeuf de Kobe, au Japon ? Non ? Alors, pourquoi safurulayeriez-vous ?
Idée numéro 2 : de la viande coupée en tranches fines. D’où l’on pourrait considérer l’option viande émincée. Enfin, « émincée viande »…
En repensant au menu « Riz à viande » et « Riz au viande » du même établissement, je me dis que le métier de ce restaurant, c’est aussi l’hésitation. Il sert un peu trop de doute à mon goût…
Une autre preuve ? Re-regardez.

C’est également marqué : « Riz au poisson rouge ». Qu’est-ce qui me dit que ce n’est pas le poisson qui est rouge ?
Dans le doute, j’aurais pris une salade, si j’y étais allée ce jour-là. Ou juste un café.
Parlant de repas, d’ailleurs, n’est-il pas l’heure de déjeuner maintenant ? Partons pour les deux : salade et café. Le tout fait maison.
Une salade comme celle-ci…

(C’est une salade orange + banane + papaye + kiwi + pruneau + pomme, avec des baies rouges. J’ai dit salade, pas laitue. Salade, pas salade de légumes…)
… et un café.

Attention, pas un café solitaire. Un café accompagné d’un éclair au chocolat.
Miam, miam !

– Un dessert et un café, alors ?
– Ah, vous êtes là ? Je ne vous ai pas entendu penser. Enfin, je veux dire, le « presque-safurulayeur », ce n’était pas vous…
– Oui, je suis là. Votre « café accompagné », c’est un dessert et un café, en fait.
– DESSERT ? Pas ce mot, malheureux ! Ne réveillons pas la blessure infamante !
– Quoi donc ?
– Cette triste affaire de « desserts » pour les tirailleurs sénégalais. Vous n’avez pas suivi la polémique ?
– Non.
– Vous avez économisé une raison d’attraper un ulcère à l’estomac. Abrégeons, et allons donc manger.
Car « il fait faim », non ?
Bon appétit et à la prochaine !
Coumba Sylla