DAKAR – Le 14 février, c’est…
– Ah, le 14 février !
… c’est le jour où on nous pousse à étaler notre amour…

– « Pousse » ? Moi, j’aurais dit « presse ». A y repenser, je dirais en fait « stresse »… Tout bien réfléchi, je dirais « tympanise »… Je vous ai interrompue, pardon.
Donc, aujourd’hui, Saint-Valentin, amour et compagnie.
En entendant les déclamations de tous genres et sur tous les tons ici et là, je me dis que j’aurais dû en faire une depuis longtemps. La Saint-Valentin, voilà une belle occasion.
– Vous nous la jouez « Je suis une femme amoureuse » ?
– Euh, en quelque sorte, oui…
Je vais déclarer ma flamme à quelqu’un. Enfin, je vais essayer, parce que je crois que je ne suis pas très douée pour cela.

C’est une femme. Elle se prénomme Faty.
Cet espace où j’erre à mon aise est un peu le prolongement de nos « conversations » qu’elle subit depuis que j’ai pu aligner des mots compréhensibles (ou que je pense tels). Un rien peut réveiller mon enthousiasme verbal (oral ou écrit), quelques-uns le savent mais Faty, elle, en a une vraie expérience.
Faty est ma soeur aînée.
Dieu, que je lui ai cassé les oreilles ! Ses « Ca ne m’intéresse pas », « Tu vas me laisser réviser, oui ? J’ai un devoir demain ! », « N’kulo kɔrɔla ! [Silence, enfin !] » n’y ont rien fait.

En tant que soeur cadette, je lui en ai fait voir d’un certain nombre de couleurs (pas seulement à elle. Les autres membres de la fratrie ont également, disons, eu leur dose). Je ne pouvais pas lui en faire voir de toutes les couleurs à cause des parents (et surtout d’un oncle fort sévère, qui ne baissait jamais la garde de la limite à ne pas franchir).
Je nous revois encore, enfants (avant l’arrivée des autres membres de la fratrie), je la vois essayer de rattraper mes bêtises en en endossant la responsabilité devant les parents. Il y a quelques années, ma mère m’a révélé qu’elle n’a jamais été dupe (mince, alors !) : il lui suffisait de nous regarder pour savoir qui avait fait quoi. Elle m’a aussi raconté qu’un jour, après une énième bêtise, alors que Faty se morfondait d’inquiétude imaginant les conséquences inévitables, j’ai fanfaronné, pensant qu’aucun adulte n’était dans les parages : « Ne t’en fais pas. Je dirai que c’est moi. Ils ont l’habitude, maintenant ». C’est vrai, j’ai toujours été la plus kulo gɛlɛn [réfractaire à l’autorité] des deux. Peut-être même de toutes les soeurs.
Faty est bienveillante.
En grandissant, on change. Les liens se distendent pour certains, se renforcent pour d’autres. En dépit des frontières, de nos parcours, de nos expériences – celles qui nous mettent en joie ou celles que nous aurions volontiers évitées -, Faty a toujours été présente pour moi (et pas seulement, mais bon, je parle pour moi…).
Quand ça va, elle est là. Et ce sont des fous rires lors de dialogues qui semblent sans queue ni tête. Du genre qui, un jour, a fait s’exclamer notre père : « Worooo ! Vous ne vous racontez que des manamana kow [futilités] quand vous vous téléphonez ! »
Quand ça ne va pas, elle est là également. Dans ces cas, il arrive qu’une conversation entamée sur un ton maussade se termine sur des éclats de rire de larrons en foire.
Faty est une réserve d’empathie.
Elle connaît mes goûts douteux et mes mesures disproportionnées. Quand, faisant les courses, elle tombe sur un habit ou des chaussures et les prend en se disant qu’ils pourraient m’intéresser et m’aller, eh bien, ça tombe juste (elle doit être née avec un compas dans l’oeil) : j’y suis à l’aise comme la narratrice de Ken Bugul dans « Mes hommes à moi » l’est dans sa « robe en jersey ».

« Dans cette robe en jersey, je me sentais dans ma peau, dans ma propre peau. Toute seule. Je ne savais pas si ce que je ressentais pouvait être partagé, et franchement je ne m’en souciais pas. Moi, j’étais bien. »
(Vous voyez comme d’autres peuvent, mieux que vous, traduire ce que vous peinez à dire ?)
Faty a un coeur grand comme ça.
Au Mali (et au Sénégal aussi, me semble-t-il), on croit qu’un enfant prend sept traits de caractères chez la personne d’après laquelle on le baptise.
J’aurais aimé avoir une fille pour lui donner le prénom de Faty. Le temps ne semble plus mon allié pour ce faire, mais d’autres y penseront, j’en suis convaincue. Les éventuels petits frères et petites soeurs de ces futures Faty auront beaucoup de chance, même si elles ne prenaient qu’un trait de caractère de ma grande sœur.
(Ses qualités semblent communes à d’autres de ses homonymes de ma vie, qu’elles s’appellent Faty, Fatou ou Fatim. Le prénom y serait-il pour quelque chose ? Il faudrait que je me renseigne…)
Faty est un amour de sœur. Et l’une de mes meilleures amies.

Faty, tu es une femme formidable !
Je t’aime.
Ala ka balimaya to.
Coumba Sylla
Coucou. Mes amitiés à Faty et mes zamours à ma fille de coeur.
Je dis merci pour ces mots que je dédie à ma soeur à qui j’ai donné le nom de ma fille. Comme tu as su dire les sentiments qui m’animent.
Soit benie Coumba.
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Beau témoignage ! Bravo à faty et chapeau pour bb….la reconnaissance est rare de nos jours! Bisous
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@Aminatou : merci ma mère de coeur. Ma soeur est donc aussi ma tante. Longue vie et santé, et amen pour la bénédiction.
@Many : merci, i ni baraji. Bises.
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